28 Décembre 2011
« Suspecté » de crimes de guerre, le général Nezzar est poursuivi par la justice helvétique au titre des fonctions qu’il a eu à occuper durant la décennie 90. Situation ubuesque où des militants fascistes, ennemis jurés des droits de l’homme, actionnent une action publique dans un Etat démocratique au nom d’une doctrine à laquelle ils ne souscrivent pas et à laquelle ils ne reconnaissent aucune légitimité.
La réponse à la question posée pourrait paraitre évidente : Il faudrait soutenir le Général défenseur de la République face aux théocrates détracteurs de la démocratie. C’est ce que le cœur devrait commander et c’est l’argumentaire qui ressort de la pétition mise en circulation. Il y est rappelé le large front de résistance constitué autour de l’action anti-terroriste menée par l’ANP. Elle déterre pour les besoins de la cause un discours anti-intégriste depuis longtemps délaissé. Et remet à l’ordre du jour les crimes avérés et abjectes de l’islamisme. Seulement, il me semble que les choses sont loin d’avoir cette simplicité.
Il y a lieu, dans une conduite de raison, de revenir sur la genèse qui a mené à l’état actuel des choses. Ne faut-il pas interroger nos pétitionnaires sur ce qui a empêché notre société d’engranger un quelconque acquis dans sa confrontation à l’islamisme ? Ne faut-il pas se demander comment l’islamisme algérien a pu échapper, en Algérie et dans le monde, à une condamnation et une disqualification méritées au vu des crimes de masse dont il est coupable? N’y a-t-il pas lieu de chercher à comprendre les racines de la persistance des illusions sur la nature fasciste de cette mouvance? N’aurait-il pas fallu que les auteurs de la pétition s’interrogent sur le lien existant entre « le silence » des autorités au sujet des malheurs du Général Nezzar et l’aboutissement actuel de l’arrêt du processus électoral, préfiguré par les différends rounds de dialogues et modelé par les politiques dites de « concorde » ou de « réconciliation » ?
L’injure faite, aujourd’hui, au Général Nezzar est-elle autre chose que l’écho assourdissant du traitement qu’il a choisi de faire au début du terrorisme du Fis : l’occultation de la gravité de l’attaque de Guemmar pour que les « élections » se tiennent ? Il semble bien que le Général a fini par faire les frais de la politique issue du coup d’État du 29 Juin 1992.
L’arrêt du processus électoral avait révélé la possibilité d’un large front de Résistance Républicaine. L’assassinat du président Boudiaf compromettra cette perspective, et la politique de containment du peuple, caractéristique du système, sera plus que jamais revigorée. Le président Boudiaf avait pensé une initiative tournée vers le peuple, son assassinat tournera toutes les initiatives vers une classe politique anachronique, si peu représentative que son seul leitmotiv restera celui de la réhabilitation du Fis et de l’absolution de ses organisations criminelles.
Des anti-intégristes, à l’image du Général Nezzar, de l’actuel premier ministre, ou de l’ancien secrétaire général de l’UGTA existent au sein du système, c’est incontestable. Mais ils n’ont ces positions que dans les limites qu'exige la préservation du système. Cause qui les uni aux islamo-conservateurs. C’est ainsi que l’essor du CNSA sera fortement bridé ; que le contenu patriotique du rassemblement projeté par Boudiaf va dégénérer, par la grâce d’un remake tacite de l’article 120, en un rassemblement de caporalisation de la résistance à l’islamisme. Les authentiques démocrates et républicains seront les premières victimes du coup d’Etat du 29 Juin 1992. Taxés d’ « extrémistes » ils seront montrés de tous les indexes dialoguistes.
Ce sont tous les choix fait aux lendemains de l’arrêt du processus électoral, et surtout ceux induits et initiés par le coup d’Etat du 29 Juin 1992, qui ont préservé l’islamisme d’une condamnation de l’Histoire. Comment dès lors demander à un juge helvétique de considérer autrement ce que le système, dans son unité, a considéré comme une « tragédie » et non pas une confrontation historique ?
Mr Nezzar est un peu ( ?) la victime de lui-même, de ses choix d’hier, alors qu’il pensait certainement que l’élagage à gauche ne pourrait pas s’étendre au point de l’atteindre. Tel est pris celui qui croyait….
Pour ma part je garde ma signature pour des pétitions nettement plus tranchées, qui pourraient se faire contre les lois scélérates dites de « concorde » ou de « pardon », ou pour l’instauration d’un tribunal pour crime contre l’humanité devant lequel pourraient être traduit Abassi, Benhadj et leurs complices. Les pétitionnaires d’aujourd’hui et le Général Nezzar seraient-ils de ces pétitions ?